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Prévention spécialisée
Action éducative qui s’adresse à des jeunes et groupes de jeunes

Les permanences éducatives : l’aller-vers à l’envers !

Il est 17h30 pile. Dès que la porte d’entrée est ouverte dans le petit local mis à disposition par Thonon Agglomération (politique de la ville) sur le quartier de Sainte Hélène à Thonon-les-Bains, une dizaine d’enfants s’engouffrent. Ils ont l’air de savoir exactement quoi faire. Alors que l’éducatrice ouvre le placard, Mia, Mayra, Younes, installent les chaises, les autres se précipitent… les premiers sur les verres, les autres sur les gâteaux, Narimène remplit la carafe d’eau. Tout le monde prépare, installe. L’éducatrice rajoute les fruits et en 2 minutes tout est prêt. La permanence des éducs de l’E.P.D.A. de Prévention Spécialisée peut commencer.

Ici, ça commence par un goûter. Ailleurs, il n’y en a pas forcément. Les heures varient selon les sites d’intervention, les lieux aussi. Parfois, ça se passe dans les locaux de secteur des éducateurs, parfois dans une maison de quartier, parfois même, dans un établissement scolaire.

Pour Tiago, 14 ans : « on vient ici pour se voir entre nous, et pour voir les éducateurs. On discute de tout, de rien, de l’école, des problèmes éventuels, des questions…. Aujourd’hui on doit parler de notre projet de séjour éducatif. » Ils sont trois garçons de 14-15 ans qui ambitionnent de partir 2 jours et 1 nuit en montagne. Ils négocient : « on va manger quoi ? Il y aura des tacos ? Promis, s’il y a Internet et une piscine, je serai calme… ».

Zackaria, un jeune inconnu de l’éducatrice arrive à la permanence. Il salue tout le monde. Visiblement, il connaît les 3 grands du groupe. Il explique  » Je voudrais intégrer le projet de séjour éducatif avec mes copains. Ils m’ont dit que, comme je ne les connais pas, je pouvais rencontrer les éducateurs ici. » La professionnelle prend un temps pour parler avec le nouvel arrivant. Elle ne donnera pas sa réponse ce jour-là, mais elle écoute. Une décision sera prise avec ses collègues, avant de réunir les jeunes concernés à un autre moment, dans un endroit plus approprié. Pour la professionnelle « c’est en rencontrant les copains des copains que le réseau, nécessaire au travail de lien social, se tisse ».

L’éducatrice en profite pour faire un point sur le projet : qui est concerné à la base ? Comment financer ? Combien de jours de chantiers éducatifs pour la participation financière des jeunes ? On sort un agenda, on regarde les dates pour choisir les jours de travail en adéquation avec la réglementation du droit du travail,… on parle des règles de vie communes. Tout le monde est d’accord sur le fait que chacun doit aider, ranger, nettoyer, et même faire à manger. Dans la bonne humeur et le respect, on discute, on se taquine un peu, sur le rôle de la femme, sur la cuisine, sur le ménage… et l’éducatrice répond avec assurance et humour. Tout le monde est rassuré.

Les plus jeunes qui sont également présents commencent à évoquer une sortie éducative.

Les idées fusent, certains proposent de faire un tournoi de foot inter-quartier. Le rôle des éducateurs présents est de réfléchir avec les jeunes à ce qui peut être mis en place. La professionnelle explique que les éducateurs sont là pour parler de la réalité, démontrer la faisabilité des projets, quels qu’ils soient : « C’est parfois difficile, mais jamais complètement impossible ». Les jeunes discutent alors de l’organisation qu’ils pourraient prévoir : « il faudrait une équipe mixte par quartier de Thonon avec 5 joueurs et un remplaçant. Nous, on peut s’occuper de l’arbitrage, puisqu’on reçoit dans notre quartier ». On parle de chantier d’autofinancement de projet pour faire les sandwichs du midi, de la récompense du tournoi qui pourrait être une sortie avec les éducateurs… « Quand on met les jeunes en position de réflexion du projet, ils ont plein d’idées ! » se réjouit l’éducatrice.

Les permanences ne se ressemblent pas. D’un endroit à l’autre, d’un jour à l’autre, d’un éducateur à l’autre. Ce que toutes ont en commun, c’est la notion de l’accueil libre. C’est un lieu neutre de rencontre et d’échange, dans un endroit et un temps donné (en dehors des temps scolaires), connu et annoncé. Pour l’éducatrice, « c’est une façon de rendre les jeunes mobiles. Pour une fois, ce sont les jeunes qui viennent jusqu’à nous. C’est leur choix de venir… c’est de la pure « libre adhésion », principe fondateur de la prévention spécialisée. La permanence éducative rend les jeunes acteurs. C’est l’aller-vers à l’envers ! » Les adolescents peuvent venir 5 minutes, une heure, passer dire bonjour. Leur liberté est totale (dans le respect des règles de la permanence et de la vie en général). Tiago renchérit : « Tu peux venir, rester ou pas, il n’y a pas d’inscription, tu n’as pas besoin de prévenir ».

D’ailleurs, une autre professionnelle explique « Si ta permanence a lieu de 17h30 à 19h, tu dois être là avant l’heure prévue, et qu’il y ait du monde ou non tu maintiens ta présence jusqu’à 19h. Quelqu’un peut passer juste avant la fermeture »

D’ailleurs, il est l’heure de ranger. Les jeunes, qui ont bien intégré les règles inhérentes aux permanences éducatives, se saisissent du balai, de l’éponge. La permanence éducative se termine comme elle a commencé. C’est un joyeux moment qui reviendra la semaine prochaine !